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Conseils d'arrière-saison

Pour beaucoup d'amateurs qui commencent une collection d'oiseaux aquatiques, l'automne est, par excellence, considéré comme la période du repos bien mérité, après les exigences d'une saison d'élevage.
Cette erreur, nous l'avons tous commise, et pourtant elle est souvent à l'origine de bien des problèmes, qui vont se poser à l'approche du mauvais temps.
Faisons donc ensemble un petit tour d'horizon en ce début d'automne, afin d'éviter bien des désagréments par la suite. Essayons donc de répartir les différentes activités en fonction des exigences du moment.

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1. VERMIFUGEAGE

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Cette opération fait sourire certains, qui vous diront :"Mes canards se portent bien ; pourquoi les vermifuger ?" Répondez-leur qu’ils sont bien sûrs d'eux-mêmes ; demandez-leur également s'ils contractent une assurance incendie quand leur maison commence à brûler !
Insistons donc sur ces soins, à prodiguer tout d'abord fin septembre et avant le retour du printemps. Ils doivent de toute façon précéder d'au moins quinze jours la première ponte, si vous voulez éviter de ne récolter que des œufs clairs. Soyez donc très vigilants si vous avez des bernaches Néné, qui pondent en moyenne pendant la première semaine de février ! Traitez-les plutôt après la ponte. Même prudence vis-à-vis de plusieurs variétés de casarkas !
Plusieurs articles ont déjà été publiés là-dessus. 
Ajoutons à titre indicatif qu'il ne faut jamais administrer en même temps un vermifuge et un antibiotique !

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2. MODIFICATIONS ÉVENTUELLES A APPORTER AUX ENCLOS


Nichoirs : ils seront vidés de leur contenu, le foin ne pouvant que pourrir en hiver ou offrir refuge à quelque prédateur indésirable. Après les avoir désinfectés, on pourra éventuellement les rentrer pour les faire bien sécher avant de les traiter s'il le faut, contre l'humidité. Ils seront remis en place avant le début du printemps. S'ils n'ont pas été choisis par l'un ou l'autre couple pendant une ou deux saisons, il est clair qu'il faut en changer l'emplacement ou l'orientation. A ce propos, je remarque que les nichoirs dissimulés dans la verdure et près des plans d'eau ont beaucoup de succès, leurs occupants s'y sentent peut-être plus en sécurité.


État des clôtures : chaque année, je me rends compte que certains problèmes peuvent se poser si l'on n'y prend garde. C'est surtout vrai pour les clôtures extérieures, qui ont pu souffrir sans que l'on ne s'en rende compte, et peuvent parfois laisser passage à quelque visiteur indésirable. Rappelons à ce sujet la sécurité qu'offre une clôture électrique. Ne me dites pas que c'est une dépense : que vous coûterait la perte d'un couple de valeur ?


Plans d'eau : avant l'arrivée du froid et du gel, voyez s'il est possible d'installer ou d'améliorer un système de trop-plein ou de vidange. Il est indispensable à l'hygiène de nos oiseaux et nous rend la vie bien plus facile. Veillez aussi à ce que la profondeur et la dimension de vos bassins conviennent bien aux exigences de leurs occupants. Un couple de sarcelles se contente d'eau peu profonde. Il en est tout autrement des érismatures, garrots et autres plongeurs.


Végétation : c'est maintenant que nous allons nous rendre compte des nombreux avantages que présentent les plantes et arbustes à feuillage persistant !
Les feuilles mortes vont recouvrir nos pelouses, pour pourrir dans les plans d'eau et obstruer les tuyaux d'évacuation. Toute protection naturelle contre les intempéries aura donc disparu. D'autre part, le laurier-cerise étendra ses branches généreuses et offrira un abri valable contre la pluie, le vent et la neige. De plus, il présente le grand avantage de se laisser tailler "comme un charme" en vous offrant ainsi des pousses à repiquer.
Je remarque d'autre part l'attrait des canards pour des plantes sauvages comme l'iris d'eau et autres joncs, que l'on peut se procurer dans tous les marais, et qui constituent la décoration la plus naturelle et la plus économique qui soit.
Protégez-les lors de la plantation, de la curiosité et de la convoitise des siffleurs, bernaches, dendrocygnes et de la plupart des oies. Un petit treillis de 50 cm peut être aussi discret qu'efficace. J'y pratique de petites ouvertures qui seront autant d'accès pour des animaux de petite taille. 

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3. RÉPARTITION DES COUPLES


Je ne crois pas qu'il faille encore insister sur l'importance du choix d'un enclos en fonction des couples qu'il va abriter ! La possibilité d'un croisement, l'agressivité de certains oiseaux, la profondeur du plan d'eau, la présence d'herbe et autre végétation sont autant de facteurs dont il faut évidemment tenir compte. Rappelons par exemple, que le régime alimentaire des oies et bernaches se compose au moins de 60% d'herbe. Quand je vois brouter mes"cou-roux"et mes cravants, la preuve en est très vite faite.
N'oublions pas non plus qu'en plus de la haute valeur nutritive de l'herbe, celle-ci est indispensable pour maintenir l'enclos en bonne condition par temps de pluie et durant tout l'hiver.
Si au cours de la saison écoulée on a recueilli un maximum de renseignements concernant la ponte, le pourcentage d’œufs fécondés, les résultats d'éclosion et le nombre de canetons qui restent en vie, rien n'est plus simple de tirer des conclusions. Si deux saisons de suite, une carie ne pond pas ou anormalement peu, si un mâle féconde très mal, à vous de prendre les décisions qui s'imposent !
La sélection ne peut être que bénéfique ! Si d'autre part, des signes évidents de consanguinité se manifestent, tels que : fécondation très pauvre, mortalité élevée dans l’œuf, éclosion pénible, jeunes faibles et peu résistants, échangez au plus vite un des partenaires avec un autre éleveur.

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4. RÉGIME ALIMENTAIRE


L'alimentation de tout animal privé de son milieu naturel ne peut rester identique toute l'année. A l'état libre, elle varie en fonction de trois facteurs déterminants : la saison de reproduction, la mue, l'hiver.
La nourriture de base de la plupart des aquatiques est le froment, présenté tel quel ou mélangé à d'autres céréales sous forme de granulés.
Exception à cette règle, les érismatures, au régime presque exclusivement végétarien et les canards marins qui consomment énormément de poissons et d'algues. 
En captivité, ils ont donc besoin de beaucoup plus de protéines que d'autres. Le ROYAL CANIN HAUTE ÉNERGIE est une excellente compensation, à condition qu'il soit administré avec parcimonie (10 à 15 granulés par oiseau et par jour). Un excès se traduira par le fait que le plumage perdra son imperméabilité, surtout sur la poitrine et semblera luisant et gras. A ce moment, cessez ces friandises pendant une semaine environ.
Pendant plusieurs années, ma nourriture s'est composée d'un mélange à parts égales de granulés et de graines (froment, avoine, mars, orge, cardi, sorgho, millet rond). Au cours de plusieurs saisons, je me suis rendu compte que les moins bons résultats étaient obtenus par les couples qui, à la distribution de la nourriture, étaient toujours plus tentés pat les graines que par les granulés.
Le taux de protéines de leur nourriture descendait donc alors vers 9%. C'est évidemment beaucoup trop bas, si l'on veut espérer des résultats en reproduction, pour laquelle près de 20% de protéines sont indispensables.
J'ai donc maintenant opté pour un très bon granulé dont la composition changera en fonction des besoins saisonniers, et dont la consommation fournira aux oiseaux les éléments nutritifs dont ils ont réellement besoin.
Un régime alimentaire quotidien de 100 gr par couple me semble excellent. N'imitez pas ces éleveurs qui ne sont heureux que lorsqu'ils voient les mangeoires débordantes de nourriture. Cette fâcheuse habitude ne présente que des inconvénients : les oiseaux engraissent et adoptent un comportement lymphatique, très défavorable à la reproduction. La nourriture gaspillée et répandue sur le sol va moisir par temps de pluie et se transformer en une pâte très peu appétissante. Enfin, vous allez jouer votre Saint François d'Assise, en nourrissant tous les oiseaux du voisinage. Mais il est vrai que cette attitude reste votre droit le plus strict.


Modification en cours des saisons


Lors de la mue, qui est toujours un cap pénible à passer, augmentez un peu la quantité de nourriture et ajoutez-y un peu de protéines, sous forme de farine de hareng par exemple. Ne dépassez cependant pas le taux de 6% et limitez-en l'usage à deux ou trois semaines.
A l'approche du froid, froment, orge et mars sont très valables parce qu'ils ont tendance à produire une couche de graisse qui isole de l'eau. Ce phénomène consommant beaucoup d'énergie, c'est donc l'absorption d'une nourriture plus énergétique qui va jouer son rôle compensatoire.

A la fin de l'hiver, ne prolongez pas ce régime qui serait nocif : un oiseau gras est rarement un oiseau en forme ; il serait donc mal préparé pour aborder la saison de reproduction.
A l'approche de la période de ponte, un changement s'impose dans l'alimentation où il faut atteindre un taux de protéines d'environ 16% et réduire le froment, pour arriver à aborder la période de reproduction avec un granulé spécialement prévu à cet effet. Comme je l'ai déjà signalé dans un numéro précédant, il est évident qu'un granulé de ponte n'augmente pas le nombre d’œufs, mais est très bénéfique, puisqu'il accroît le taux de protéines, de vitamines et d'oligo-éléments.
Notons à ce propos, que si l'on veut envisager des résultats d'élevage avec des espèces nordiques, telles l'oie empereur, la bernache à cou roux et la bernache cravant, il faut que toute accumulation de graisse, due à une alimentation trop riche, ait entièrement disparu à la fin du printemps. On a également remarqué que la présence d'eau froide dans les bassins peut être très favorable à ces animaux. Selon des scientifiques anglais, il y aurait un rapport direct entre ce phénomène et la fonte des glaces, qui dans l'Arctique précède de très peu la période de reproduction.
Soulignons également l'importance de la répartition de la nourriture dans différentes mangeoires, dans les enclos où se trouveraient des couples trop dominateurs. Les disputes occasionnelles peuvent être une très bonne chose en soi lors de la distribution de la nourriture : elles réaffirment les liens du couple, les partenaires se trouvant plus excités après l'intervention de l'un d'entre eux à l'égard d'un autre couple. C'est notamment le cas des milouins américains aux yeux rouges (Canvasback), que j'ai souvent vu s'accoupler dans de telles circonstances.
Mais d'autre part, un repas pris à la hâte, dans la crainte d'un coup de bec, peut-être très traumatisant et laisser l'oiseau en état de sous-alimentation permanente.
En guise de supplément, les lentilles d'eau sont un élément apprécié à sa juste valeur. Si vous n'en disposez pas, comme c'est toujours le cas à l'arrière saison, distribuez du mouron blanc, des légumes verts hachés (très peu de salade).
Certaines espèces seront plus exigeantes j'ai vu dans différents centres d'élevage anglais, distribuer des granulés flottants pour truites, aux harles, du mélange pour perruches aux érismatures. Un granulé pour chien était même offert aux eiders, dans des cavités en forme d'entonnoirs, garnies de petites pierres rugueuses, et ce, afin que leur bec, qui a tendance à se développer exagérément hors du milieu naturel, reste affûté...
Dans le même but, il est parfois intéressant de nourrir alternativement sur gravier et sur béton, la recherche de nourriture usant l'extrémité du bec.
Certains éleveurs, spécialisés dans l'élevage des canards marins, vont même jusqu'à leur distribuer des granulés flottants, dans de grands abreuvoirs contenant de l'eau salée, et ce afin de conserver en bon état de fonctionnement la glande d'extraction de sel, située sur la partie supérieure du bec, un peu au-dessus des narines. En effet, si cette glande ne fonctionne pas ou mal, comme c'est le cas en l'absence d'eau salée, elle peut très vite provoquer des infections au niveau des sinus.

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5. MANIPULATION DES OISEAUX


En période de mue, il est vivement déconseillé d'attraper les aquatiques sans motif réel. En effet, à cause de la perte de leurs grandes rémiges, ils sont dans l'incapacité de voler. C'est l'époque où dans la nature, ils recherchent une île ou une immense surface d'eau comme refuge. Ils vivent donc en état de stress, se sentant très vulnérables ; cet état d'esprit se retrouve chez l'oiseau détenu en captivité.
C'est également le moment de la repousse des nouvelles plumes, appelées par les Anglais "blood feathers", plumes de sang. En fait, la première manifestation de ce renouveau est l'apparition sur les ailes de sortes de petites gaines bleuâtres ; elles sont gorgées de sang et très délicates. Il faut donc éviter d'en arracher, au risque de provoquer une hémorragie, qui serait bien difficile à contenir.

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6. ACQUISITION DE NOUVEAUX PENSIONNAIRES


Avant la réception d'oiseaux qui vont enrichir votre collection, quelques questions fondamentales se posent :

  • d'où viennent-ils ?

  • dans quelles conditions d'hygiène ont-ils vécu ?

  • faut-il les mettre en quarantaine et les traiter ?

  • quel était leur régime alimentaire ?

  • ont-ils besoin de beaucoup d'herbe ?

  • sont-ils ou non agressifs et faudra-t-il les isoler ?

  • sont-ils sensibles au froid et au gel ?

  • ont-ils besoin d'une eau profonde ?

  • ont-ils des exigences de nidification ?


Vous me prendrez peut-être pour le dernier des maniaques et pourtant, si vous prenez le temps de répondre à ces questions élémentaires, vous vous éviterez pas mal de tracas et de surprises extrêmement désagréables.
A l'arrivée de vos nouveaux animaux, un principe doit prévaloir : ne les mettez jamais dans un enclos à la tombée du jour. En effet, contrairement à une croyance assez répandue, l'inaptabilité à un biotope nouveau augmente encore dans l'obscurité. Autrement dit, si un prédateur pénètre de nuit dans l'enclos, l'oiseau ne connaîtra pas encore les endroits où il peut trouver un refuge sûr, il s'enfuira de toutes parts, excitant encore davantage la curiosité et l'appétit de l'intrus. L'issue de l'histoire sera toujours celle que vous devinez. Croyez-moi, j'en ai fait la triste expérience.
Le bon système consiste, je crois, à les mettre dans un endroit calme pour la nuit. Le lendemain matin, lâchez vos oiseaux, sans les prendre en mains, devant le plan d'eau, après avoir déjà nourri les autres. De cette façon, les anciens pensionnaires penseront d'abord à s'alimenter et non à agresser les nouveaux venus ; d'autre part, ces derniers ne se sentant pas poursuivis, s'intégreront plus facilement au groupe, où ils passeront bien vite inaperçus.
Restez cependant vigilants, si vous remarquez des signes d'agressivité, fréquents chez les dendrocygnes d'Eyton et à bec rouge, entre autres. Assurez-vous que les nouveaux venus puissent manger et boire ; le transport et le changement de biotope sont déjà bien suffisants. Certains oiseaux en intimideront d'autres à ce point, que ces derniers n'oseront plus se nourrir et deviendront automatiquement les boucs émissaires de tout l'enclos. Ils peuvent très vite mourir de faim et de stress.
Veillez donc à ce que tout soit prêt pour accueillir vos oiseaux : moins ils seront dérangés, plus vite ils s'adapteront à leur nouveau milieu.

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7. A L'APPROCHE DE L'HIVER

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Dans le courant de l'automne, vous avez vidé plusieurs fois vos plans d'eau, pour en retirer les feuilles et les fruits qui s'y sont accumulés et dont la présence est évidemment dangereuse. Tout doit être parfaitement propre.
Certaines espèces, telles que les dendrocygnes et les sarcelles à collier, devront être protégées d'un froid trop vif et persistant. Il est donc nécessaire qu'elles disposent d'un refuge, où elles iront d'elles-mêmes s'abriter.
Pour y arriver, j'utilise un petit stratagème très simple : dès la mi-octobre, je place les mangeoires de plus en plus près de l'entrée de l'abri, puis je les y rentre peu à peu. S'il y a quelques hésitations au départ, la méfiance fait vite place à l'indifférence, du fait que rien ne se passe quand ils sont dans l'abri.
Pour la nuit, je branche une lampe de 5 watts, qui les habituera vite à la présence anormale de lumière en pleine nuit. De cette façon, quand je devrai utiliser une lampe infra-rouge pour couper l'effet du froid en hiver, il n'y aura là pour eux, rien de bien neuf. A cette époque seulement, une couche de paille, renouvelée toutes les semaines si nécessaire, les isolera parfaitement du froid provenant du sol. Je lui préfère encore la tourbe, qui est bactéricide.
Le grand avantage de ce système, est qu'il évite des courses folles derrière les oiseaux de plus en plus effrayés. Croyez-moi, quand ils auront goûté au calme et à la chaleur de l'abri, ils ne resteront plus à l'extérieur, exposés aux intempéries.
Par temps de gel, il est fondamental que les oiseaux puissent continuer à se baigner. Maintenez donc une surface d'eau libre d'au moins un mètre carré, de crainte que, se baignant sur une surface moindre, des oiseaux ne plongent et ne retrouvent plus le trou pratiqué dans la glace. Si ce travail vous est matériellement impossible, prévoyez des bassins en plastique d'une vingtaine de cm de profondeur, pour que les oiseaux puissent s'y ébrouer. Mettez-les à l'extérieur de l'abri, sinon, celui-ci sera vite transformé en un cloaque invraisemblable ! Changez cette eau tous les jours.
Quand la neige recouvrira le sol, il est indispensable que vos oiseaux reçoivent de la verdure. Le chou frisé, distribué finement haché ou en feuilles, de même que le chicon witloof sont particulièrement appréciés.

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                      Cet article, toujours d’actualité a été écrit par Michel GHISLAIN
 

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